mercredi 8 avril 2020

Notre vie est une dystopie. Quoi ajouter de plus?

Hier, les experts québécois ont dévoilé leurs scénarios : celui du pire, celui du meilleur.
Mais au-delà de ces prédictions gouvernementales, une chose est sûre : le scénario bien réel qu’on vit en ce moment dépasse, et de loin, le pire des films catastrophes apocalyptiques hollywoodiens.
Pourquoi ? Parce qu’aucune série, et aucun film ne nous avait prédit qu’un jour, au Québec, des gens mourraient seuls, sans pouvoir prendre ceux qu’ils aiment dans leurs bras.
LE GRAND DÉPART
Quand j’ai vu qu’à New York, les morgues débordent tellement qu’on envisage d’enterrer les gens dans les parcs, je me suis dit que même un scénariste sadique n’aurait pas inventé un rebondissement comme ça.
Si la situation actuelle se déroulait dans un film, on s’exclamerait tous : « Ben voyons donc, ils exagèrent ! Pousse, mais pousse égal ».
Si vous pensiez que La servante écarlate est une dystopie ( « un récit de fiction qui décrit un monde utopique sombre », selon le dictionnaire), vous savez que ce qu’on vit en ce moment ressemble de plus en plus à un cauchemar éveillé.
On a vu et revu des films et des séries catastrophes. Mais j’avoue qu’il y a un élément auquel aucune de ces fictions, même les plus apocalyptiques, ne nous avait préparés : c’est l’aspect humain. Je m’explique.
Dans toutes les fictions qui imaginent une pandémie qui ravage la planète, on décrit les hôpitaux débordés, l’économie qui s’effondre : tout ça était prévisible.
Mais aucun film ne nous a préparés au drame profondément intime d’une future maman qui doit accoucher seule dans un hôpital. D’une mère qui doit être séparée de son enfant naissant, car il risque d’être contaminé.
D’un père qui meurt d’un cancer et qui ne peut pas serrer dans ses bras, à son dernier souffle, ceux qui l’aiment le plus au monde.  
D’une femme médecin qui doit passer des semaines loin de sa famille, sans contact physique.
On pense toujours que les scénarios catastrophes doivent recourir à des effets spéciaux énormes pour nous faire trembler de peur. Alors qu’il suffit de nous montrer une grand-mère qui pleure devant la vitre de sa résidence pour aînés pour nous arracher toutes les larmes du monde.
Les scénaristes, même les plus cyniques, sont très bons pour imaginer des histoires d’horreur qui donnent froid dans le dos.
Mais qui aurait cru que ce qui nous ferait le plus de peine, c’est de ne pas pouvoir serrer la main de notre meilleur ami, de ne pas pouvoir prendre dans nos bras ceux qui comptent pour nous ?
Donner ses dernières volontés au téléphone ou via une tablette, se tenir à deux mètres d’un amoureux qui s’en va, enfiler une combinaison d’astronaute pour apercevoir un proche qui souffre, ça, c’est le scénario du pire.
LE CHOC DU PRÉSENT
Tous les scénaristes ont eu tout faux. Ce ne sont pas des monstres à la Alien ou des meurtriers à la hache qui me font peur. C’est l’idée de ne pas pouvoir caresser les cheveux de mon enfant.
Ce n’est pas la mort qui fait peur. On va tous y passer un jour.
Ce qui fait peur, c’est de mourir seul. Sans une caresse, sans un dernier bec, sans un câlin.
Ça, mes amis, c’est le pire des scénarios.

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